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Très Honoré d’avoir été élu 1er vice-Président de la Fédération Nationale des Banques Populaires

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Politique Economique

La nécessité des réformes structurelles

Conférences introductives à la 4e édition des Nocturnes de l’économie, tenue le 20 mars 2018, à l’Université de Créteil, par Agnès Bénassy Quéré et Olivier Klein.

Ci-dessous la retranscription de celle d’Olivier Klein.

Les réformes structurelles sont souvent mal comprises parce que peut-être mal définies ou parce que c’est un concept trop flou. En réalité, elles ont pour objet d’augmenter le potentiel de croissance d’une économie. Elles n’imposent pas d’abaisser les niveaux de salaire et de protection sociale par des politiques d’austérité. Et souvent, il y a des confusions entre ces démarches.

Pourquoi est-il indispensable d’augmenter le potentiel de croissance de la France par exemple ? D’abord, bien entendu, pour abaisser le taux de chômage structurel. À environ 8,5 %, le niveau de chômage structurel français est terriblement élevé. Et lorsque l’économie va nettement mieux, comme en ce moment, on a du mal à baisser en dessous de 9 %. Alors que l’Allemagne, par exemple, est à moins de 4 % de taux de chômage.

Prenons de plus le taux de chômage des jeunes, il est structurellement en France d’environ 25% pour les 15-24 ans, alors qu’il est de 7 % en Allemagne. Il y a donc quelque chose qui ne va pas et qu’il faut considérer.

Je ne ferai des comparaisons pendant mon court exposé qu’avec des pays de la zone euro pour prendre des structures sociales comparables et non des pays qui ont des structures sociales très différentes des nôtres.

La deuxième raison d’augmenter le potentiel de croissance d’une économie est évidemment d’assurer un meilleur profil de solvabilité de l’État et des services publics. Et par là même, bien sûr, d’accroître la soutenabilité de la protection sociale et des retraites.

En outre, les économies développées ont à faire face à deux révolutions : la révolution de la mondialisation – qui date maintenant de plus de vingt ans, mais qui s’est accrue largement à partir de 2000 – et la révolution technologique de la digitalisation et de la robotisation. Au total, dans les économies développées, dans le futur, il y aura évidemment de moins en moins de travail répétitif, de moins en moins de travail à faible valeur ajoutée, de moins en moins de travail qui correspond à des faibles formations. Et si ce travail-là disparaît, deux possibilités de réaction s’offrent dans les pays développés. La première est d’essayer de baisser le coût du travail, les salaires, les protections sociales, donc faire des politiques d’austérité pour retrouver de la compétitivité. La seconde est d’essayer d’améliorer le rapport qualité/prix en allant chercher évidemment ce qui fait tout l’intérêt de l’économie de la connaissance, ce qui fait la valeur ajoutée de la production de biens et services, les innovations. C’est ce que j’appelle sortir par le haut.

Et pour sortir par le haut, pour améliorer le rapport qualité/prix, c’est-à-dire pour aller chercher la valeur ajoutée et se distinguer par l’innovation des pays qui font cette mondialisation, comme les pays asiatiques par exemple, il n’y a qu’une seule possibilité : faire des réformes structurelles pour améliorer le rapport qualité-prix par l’innovation et la recherche de la meilleure valeur ajoutée de la production, soit pour obtenir le bon positionnement en gamme des produits et services fabriqués.

C’est donc la troisième raison d’en mener, totalement liée aux deux premières raisons, bien entendu.

Un exemple très simple,  lié à la crise de la zone euro. Au moment de cette crise, les pays du Sud ont connu ce qu’on appelle en économie un « Sudden Stop », c’est-à-dire une crise de non-financement brutale du déficit de leur balance courante. Les pays, pris par l’urgence du rééquilibrage de leurs exportations et de leurs importations, ont été dans l’obligation de freiner brutalement leurs dépenses, leur consommation comme leurs investissements, pour desserrer l’étau de la contrainte extérieure, au prix d’un abaissement de leur niveau de vie par des politiques d’austérité.

On a mieux compris alors qu’il y avait trois types de situations possibles dans la zone euro : celle des Allemands qui avaient construit progressivement, par des réformes structurelles réussies, une économie qui s’industrialisait et qui était fondée sur de la haute valeur ajoutée.

On avait l’Espagne qui, face à la catastrophe dans laquelle elle était au moment de la crise de la zone euro, de par une valeur ajoutée de son industrie plutôt faible et un endettement privé trop élevé, a eu comme seule solution de baisser fortement les salaires et la protection sociale, de façon à pouvoir retrouver davantage de compétitivité et de faire baisser rapidement ses importations et remonter progressivement ses exportations. Au prix d’un abaissement très significatif du niveau de vie. Ce qui d’ailleurs ne lui a pas mal réussi puisqu’aujourd’hui, d’un point de vue économique, elle s’en sort plutôt bien. Mais avec des conséquences dramatiques en termes de populisme et des conséquences innombrables en termes de chômage, de douleurs sociales, etc.

Et puis la France, qui est un peu au milieu des deux, qui a en réalité le coût du travail à peu près de l’Allemagne et qui a, en gros, une spécialisation industrielle qui n’est en moyenne guère plus qualitative que celle de l’Espagne. Et du coup, qui, jusqu’au changement de gouvernement et au lancement des réformes, était en train d’être enfermée dans les difficultés sans fin, avec une balance courante qui ne cesse d’être déficitaire, alors que quasiment tous les autres pays de la zone euro se sont rééquilibrés ou sont très excédentaires, et un déficit budgétaire permanent. Avec, en corollaire, un taux de chômage extrêmement élevé,  un taux d’emploi parmi les plus faibles, etc.

Les réformes structurelles dans un pays d’économie développée permettent d’éviter ces politiques d’austérité si on les réalise assez tôt. Si l’on n’attend pas d’être pris à la gorge au dernier moment, et contraint du coup d’adopter les politiques d’austérité pour retrouver de la compétitivité, mais par le bas et non par le haut.


Comme on le sait, le taux de croissance potentielle est, en résumé, l’addition du taux de croissance de la population disponible à l’emploi et des gains de productivité. Ce sont les deux forces essentielles qui conduisent à faire évoluer le taux de croissance potentielle vers le haut ou vers le bas. Augmenter les forces vives d’un côté et, de l’autre, les gains de productivité, accroît l’efficacité de l’économie et son potentiel de croissance.

Plusieurs réformes structurelles sont donc à mettre en place pour augmenter l’efficacité de l’économie

1) Améliorer le niveau de formation

Parce que dans une économie de la connaissance, il n’y a pas d’autres solutions pour les pays développés que d’essayer d’augmenter le niveau de formation. Et on sait à ce sujet que la France, à part pour ses élites, est en réalité en déclin. Elle se place mal dans tous les critères de comparaison de l’OCDE. Elle se place même de plus en plus mal. Ce qui est dangereux évidemment, parce qu’il y a une corrélation assez bonne entre le taux d’emploi dans les pays développés et le niveau de connaissances des jeunes qui ont 15 ans, qui est mesuré par des tests dans tous les pays de l’OCDE de la même manière. C’est le test PISA. Ou bien encore, le test PIAAC de l’OCDE également, qui mesure les compétences en termes de calcul utiles au travail et de capacité d’expression des personnes au travail. Et là aussi, la France se place assez mal et perd des places progressivement. Donc, son niveau de formation en réalité est en baisse et est trop bas par rapport aux pays les plus performants.

Il est donc essentiel de remonter ce niveau. De plus, la formation professionnelle en France, comme on le sait, n’est pas efficace. Elle ne s’adresse pas en priorité aux personnes qui en ont besoin et coûte très cher pour un rendu extrêmement faible. Ces deux points sont des priorités de l’actuel gouvernement.

J’ajoute, pour l’enseignement, qu’en France, ce n’est pas une question de moyens. Il y a peut-être une mauvaise répartition des moyens, mais ce n’est pas une question de moyens dans son ensemble. L’enseignement public en France représente 5,5 % du PIB alors que dans la zone euro, hors France, il représente 4,5 %. Or, il y a beaucoup de pays européens qui sont bien meilleurs que nous dans les classements de l’OCDE.

2) Le marché du travail

Le cloisonnement entre ceux qui ont du travail et ceux qui n’en ont pas est totalement inéquitable. Évidemment, le taux de chômage des jeunes est insupportable. Il faut faciliter la possibilité d’avoir du travail pour les nouveaux entrants. Il faut faciliter les passages de secteurs qui sont en déclin aux secteurs qui sont en croissance. Et tout le monde doit pouvoir dans sa vie être formé pour pouvoir changer de secteur économique quand il le faut. Il faut pour cela sortir du paradoxe incroyable de ce qui est le propre d’un chômage structurel : 9 % de chômage incompressible et un peu moins de la moitié des entreprises qui cherchent à embaucher aujourd’hui qui connaissent des difficultés pour embaucher, avec le retour de la croissance.

Voilà typiquement l’objet d’une réforme structurelle : Comment faire en sorte d’abaisser le taux de chômage structurel et de rendre le marché du travail plus efficace ? Une des réflexions possibles est la flexisécurité, comme ça a été fait dans les pays nordiques, pour redonner de la flexibilité en donnant une bonne sécurité à ceux qui recherchent activement un travail, tout en incitant au mieux à travailler. Et, à nouveau, en réformant la formation professionnelle pour la rendre efficace.

3) L’efficacité des administrations publiques

Il faut savoir que la France est sur le podium européen des dépenses publiques sur PIB comme des prélèvements publics sur PIB. Et que ses dépenses publiques comme ses prélèvements obligatoires sur PIB sont supérieurs d’environ 20 % à ceux de la zone euro hors France.

On pourrait relativiser ce fort décalage en constatant que l’administration publique produit efficacement et avec une grande qualité ses services ; mais les comparaisons de l’OCDE sur l’ensemble des services publics montrent que nous ne sommes, en termes de qualité des services publics, que dans la moyenne des pays comparés, alors que nous sommes je le rappelle, sur le podium des dépenses publiques en pourcentage du PIB. C’est donc un très fort manque d’efficacité.

Certaines études montrent par exemple que l’on pourrait économiser 6 à 10 milliards d’euros annuels sur la sécurité sociale en France, tout simplement en travaillant mieux et plus efficacement, sans l’empilement des structures qui peuvent exister ici et là.

Il faut savoir encore que la France a quasi 40 % de plus de prélèvements obligatoires sur les entreprises que les pays de la zone euro hors France. Évidemment, cela se ressent sur l’emploi. Même chose pour les cotisations sociales qui font partie des prélèvements obligatoires : les cotisations sociales payées par les entreprises sont d’environ 65 % plus élevées en France que celles des pays de  la zone euro hors France. Et le taux de cotisations sociales payé par les entreprises est en corrélation très forte avec le taux d’emploi. Donc, plus on a de cotisations sociales payées par les entreprises, moins le taux d’emploi est élevé. C’est une corrélation très robuste sur l’ensemble des pays de l’OCDE.

4) Les retraites

Les dépenses publiques de retraite en pourcentage de PIB sont d’environ 40 % plus élevées que celles de la zone euro hors France. Est-ce que les retraités ont une meilleure retraite ? À peine. Mais la différence se fait tout à fait sur autre chose. Le taux d’emploi des 60-64 ans en France est de 28 %, il est en Allemagne de 56,5 %, il est en Suède de 68 %. La démographie ne permet pas de supporter un taux si bas en France. Et, à l’évidence, on aura des difficultés d’équilibre de retraite tant que l’on ne résoudra pas ce problème. Et même si l’on a fait des progrès, il reste beaucoup de progrès à faire pour suivre l’évolution démographique et faire comme certains pays nordiques, par exemple : fixer l’âge de la retraite sur l’évolution de l’espérance de vie. L’espérance de vie après la retraite a considérablement monté entre les années soixante et aujourd’hui. Il y a évidemment un problème majeur spécifiquement français puisque l’on a réduit l’âge de la retraite et non pas reculé comme on aurait dû le faire et ainsi que l’on fait les autres pays. La réforme s’impose ici à nouveau.

5) L’innovation, la R&D et le rapport qualité / prix

Nous avons du retard en France dans la R&D privée, nous avons du retard dans la part des technologies de l’information et de la communication dans le PIB, et dans l’évolution de cette part, comme dans le nombre de brevets triadiques.

Que manque-t-il ? Le fait que nos entreprises en France, entre 2000 et 2014 environ, ont eu un taux de profit (sur PIB) qui a été légèrement déclinant, alors que tous les autres pays de la zone euro ont été à peu près en hausse, sauf l’Italie probablement. Et le profit sur PIB des entreprises en France est plus bas structurellement que celui des autres pays de la zone euro. Ce qui fait que si on ne laisse pas suffisamment d’argent aux entreprises pour pouvoir investir dans la recherche et développement et l’innovation, elles se contentent de ce qu’elles sont. Et si elles n’évoluent pas en termes de qualité de leur production et d’innovation dans le monde tel qu’il est, avec ses deux révolutions, la mondialisation et la digitalisation, elles sont évidemment moins capables d’être compétitives en rapport qualité/prix et moins capables d’employer.

Dernier point sur le rapport qualité/prix. La France a un prix de travail qui est sensiblement le même que celui de l’Allemagne, mais avec une qualité, une spécialisation des industries, une valeur ajoutée trop faibles. En moyenne naturellement. Il y a des entreprises qui sont à très forte valeur ajoutée. Ceci conduit la France à avoir un déficit de balance courante, alors que tous les autres pays de la zone euro sont en train de s’équilibrer ou sont excédentaires.

Il y a des raisons dues au mode de fonctionnement intrinsèque de la zone euro, certes, mais il n’y a pas que cela. Nous devons chercher chez nous les raisons majeures de notre taux de chômage à 9 %. Le déficit public qui n’a pas cessé d’exister depuis 1974 sans discontinuer. Et une dette publique qui n’a pas cessé de monter, pour atteindre 100 % du PIB aujourd’hui. La production industrielle en base 100 en 2002 en France est à 90 en 2017, alors que l’Allemagne est passée de 100 à 122. C’est-à-dire que la France a perdu 10 % de sa production industrielle, alors que l’Allemagne en gagnait 22%.

Voilà les effets de réformes structurelles très insuffisantes depuis bien longtemps. À court terme, c’est insoutenable. Soit il faut choisir de faire comme l’Allemagne, soit il faut choisir de faire comme l’Espagne. Je vous laisse comprendre ce qui me semble préférable !

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Les Nocturnes de l’économie Université Paris-Nanterre 2017 : Le retour des frontières : la fin de la mondialisation ?

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Nocturnes de l’Économie 2016 : l’Université pour l’économie du XXIème siècle

Lors de la seconde table ronde a eu lieu un débat animé par Benoît Floc’h, journaliste au Monde, entre Philippe Aghion, Professeur au Collège de France, Laurent Batsch, Président de l’Université Paris-Dauphine et Olivier Klein, Professeur d’économie et finance à HEC et Directeur Général de la BRED

Benoît Floc’h :

M. Aghion, en quoi l’université peut-elle constituer un moteur de l’innovation et en quoi consiste son rôle.

Philippe Aghion :

Plutôt que le rattrapage technologique, l’innovation est le moteur de croissance. Pour produire de l’innovation de pointe, ou ce que j’appelle de l’innovation à la frontière, il faut générer du savoir. La Silicon Valley se situe à proximité de Stanford, la route 128 était proche d’Harvard MIT, ce n’est pas un hasard. L’innovation est aussi synonyme de destruction créatrice. Sans arrêt, de nouvelles idées, de nouvelles activités, de nouveaux jobs se substituent à d’autres. Il faut donc organiser une mobilité qualifiante et un marché du travail dynamique. L’université a donc un rôle central à jouer pour générer du savoir et promouvoir une mobilité qualifiante.

Tout d’abord, en matière de recherche, on trouve différents classements, différentes manières de mesurer la performance des universités, comme par exemple les classements de Shanghaï, du Times, des brevets, mais tous se valent. Les pays et universités qui réussissent bien et excellent en recherche s’appuient sur trois leviers essentiels.

Premièrement, les moyens, l’argent. Les États-Unis dépensent 35 000 dollars par étudiant/par an, la Scandinavie, 25 000 euros par étudiant/par an mais la France seulement 9000 euros. Et si ses grandes écoles sont riches, ses universités sont pauvres.

Deuxièmement, la gouvernance des universités, et plus précisément leur autonomie, constitue un facteur important de réussite. Les universités doivent pouvoir décider elles-mêmes de leur budget et de leur politique de ressources humaines. Celles qui fonctionnent bien disposent à la fois d’un Sénat académique, composé de professeurs conseillers du président et d’un « board » externe, réuni régulièrement, rassemblant des enseignants d’autres universités et des personnalités de la région. Ils nomment le président, suivent le budget, etc.

Troisièmement, il est très important de s’appuyer sur les incitations à la recherche, comme par exemple l’ANR (L’Agence Nationale de la Recherche qui finance la recherche sur projets). Il faut susciter l’émulation pour obtenir des bourses, cela stimule l’excellence, la qualité de la recherche.

Ensuite on relève deux facteurs de mobilité. En premier lieu, l’université à un rôle de formation des maîtres car pour générer de la mobilité, il faut que les étudiants aient reçu une bonne éducation dans le primaire, le secondaire et le premier cycle. Deuxièmement, nous devons nous assurer qu’à sa sortie de l’université, l’étudiant trouve un travail sur un contrat long qui correspond à ses appétences. Il faut donc considérer les taux de chômage, les taux de CDI mais également les indices de satisfaction de l’emploi obtenu. Les universités qui ont des moyens peuvent préparer leurs étudiants à l’insertion professionnelle.

Il existe enfin trois notions importantes que nous ne possédons pas. Il faut premièrement instaurer la possibilité d’une deuxième chance. Cela arrive de rater un concours, il ne faut pas que cela conditionne toute une vie. Il faut également ménager une diversité, une flexibilité des parcours. L’université doit proposer aussi bien des formations professionnelles que des formations générales et des grandes écoles dans l’université. Et il est nécessaire d’établir des passerelles des unes aux autres, dans les deux sens et à plusieurs niveaux.

Une deuxième notion à introduire est la spécialisation progressive. Aux États-Unis ou dans d’autres pays, au lieu de choisir directement une spécialisation, on le fait progressivement. Les étudiants choisissent une matière majeure mais celle-ci peut changer en cours de route. Avec ce système, on ne crée plus de sélection par l’échec mais une spécialisation progressive, ce qui donne un bien meilleur résultat.

Finalement, c’est l’information des étudiants sur les programmes et les débouchés qui priment. Il est nécessaire qu’ils soient bien informés de la valeur et de la qualité des professeurs. Pour cela, il faut évaluer les professeurs afin qu’ils soient en mesure de s’améliorer.

Ce sont de grandes révolutions à mettre en place dans les universités pour viser l’excellence en termes d’insertion professionnelle.

L’excellence n’est pas uniforme, il faut de l’excellence en recherche mais il en faut tout autant en insertion. Ces deux aspects là font partie de la croissance par l’innovation. Et la croissance par l’innovation génère de la mobilité sociale. Des universités fonctionnant sur ce modèle généreraient de la croissance inclusive.

Benoît Floc’h :

Merci beaucoup M. Aghion. Je vais passer la parole à M. Batsch.
Pour que l’université puisse jouer ce rôle dans l’économie, elle a donc un certain nombre de défis à relever. L’un des points que vous soulignez souvent est qu’il faut libérer le système de ses entraves. Que voulez-vous dire par là, et jusqu’où peut-on aller dans la libération du système ?

Laurent Batsch :

Pour illustrer la libération du système, je vais prendre deux exemples qui reviennent à dire que nous pourrions passer au système LMD (Licence-Master- Doctorat), près de 20 ans après Bologne.

Première exemple, le master. Recours aux tribunaux administratifs, avis du conseil d’État etc. la décision est tombée, sans surprise, la sélection n’est autorisée ni à l’entrée du master, ni entre la première et la deuxième année. Ce sont les textes. Réaction politique : sécuriser l’existant, avec un décret qui autorise le maintien de cette sélection entre la première et la deuxième année. Autrement dit, aujourd’hui, nous sommes en train de figer un cursus déjà rigide, en deux années distinctes. C’est incohérent pour les étudiants qui doivent mettre le doigt dans l’engrenage sans même savoir s’ils vont pouvoir en sortir. La seule raison de cette situation est de ne pas vouloir assumer une entrée en master sélective en première année : un type d’entrave très simple, qui est réglementaire.

Benoît Floc’h :

Mais cette entrée est souvent sélective ? Beaucoup d’établissements pratiquent une sélection, il me semble.

Laurent Batsch :

La sélection existe de fait mais elle est illégale, à l’entrée, comme en cours de cycle. Comme nous ne voulons pas adopter un texte qui établisse une sélection à l’entrée du master, nous figeons une situation dans laquelle le master est coupé en deux parties, avec une sélection décalée au milieu du cursus. C’est une entrave qui procède d’une stricte volonté politique, elle est extrêmement facile à lever

Benoît Floc’h :

N’y a-t-il pas une contradiction entre la volonté d’emmener 60 % d’une génération au niveau de l’enseignement supérieur et celle d’établir une sélection ?

Laurent Batsch :

Nous pouvons accueillir un grand nombre d’étudiants dans un master en deux années, dès lors qu’ils y ont été préparés. La contradiction réside dans la volonté d’élever le niveau général de qualification tout en « coupant leur élan » à des étudiants au milieu d’un diplôme de master.

Mais je réponds à votre question avec un deuxième exemple très intéressant, la Licence. Elle n’est pas sélective. On constate 92 % de réussite au baccalauréat général et le premier grade universitaire, l’entrée à l’université, est aujourd’hui offerte à pratiquement tout étudiant de classe terminale.

Mais aujourd’hui, à travers les classes préparatoires, STS, IUT, 450 000 étudiants sont engagés dans des formations à bac + 2. Or nous sommes dans un système de licence à bac + 3. Pourquoi les classes préparatoires ne sont-elles pas reconnues comme deux années de licence ? Ce qui permettrait de les inscrire dans une dynamique de cycle en 3 ans. Et ainsi, de faire en sorte que les lycéens qui s’engagent sur une classe préparatoire ne soient pas seulement tournés vers les concours mais aussi vers la réalisation d’un cycle complet. La seule raison pour laquelle ce système est maintenu est que la classe préparatoire est sélective.

Pourquoi a-t-on maintenu des IUT ou des DUT en 2 ans sans établir une équivalence avec le temps du cursus de la licence universitaire de technologie dans le système LMD ? La seule raison est que nous ne voulons pas admettre une licence sélective. C’est ici encore une entrave réglementaire qui constitue un blocage, un tabou mental.

Ainsi on s’interdit de développer des programmes cohérents et qualifiants sur 3 ans. Les premiers pénalisés sont les étudiants, issus de baccalauréats technologiques notamment, qui s’engouffrent dans des voies universitaires. 6 étudiants sur 10 ne terminent pas la licence en 3 ans et ne se voient pas offrir de deuxième chance. Si bien que je propose d’établir, sur la base de l’acquis des formations en 2 ans de DUT, un cycle qualifiant, cohérent, en 3 ans, qui prépare à des fonctions de cadres intermédiaires. C’est une idée de bon sens, partagée par tous mais que nous n’appliquons pas pour deux raisons. Tout d’abord parce que les IUT sont sélectifs ce qui implique que cette licence le soit aussi, et ce d’autant plus qu’elle serait très attractive. Par ailleurs, une telle licence, qui déboucherait sur un emploi à la fin du cycle, n’ouvrirait pas automatiquement l’entrée en master. Ce dernier recruterait donc lui-même sur des prérequis.

Ces entraves sont elles aussi très simples à lever afin de construire un cycle d’études cohérent dans lequel les étudiants pourraient s’engager en sachant qu’ils vont pouvoir le terminer.

Cette licence technologique, tournée vers l’emploi, permettrait d’ouvrir à des étudiants, actuellement victimes de la centrifugeuse sociale, une nouvelle voie sociale de réussite. Mais nous ne le faisons pas en raison des tabous que nous ne pouvons pas lever.

Un dernier exemple concerne l’absence de sélection à l’université. Dans de nombreuses universités les licences ont des capacités limitées. Les étudiants qui candidatent en une certaine filière très demandée, sont tirés au sort. Cela est une forme extrême de la démocratie sociale que de tirer au sort les étudiants pour les répartir. Avec une chance sur deux de tomber sur un étudiant de niveau très moyen et doté d’une motivation faible versus un étudiant qui y serait lui davantage à sa place. Nous touchons là quelque chose de profondément absurde.

Et je conclus en relevant que les filières d’excellence, en particulier en licence, sont des filières semi-clandestines. C’est-à-dire que vous empêchez certains établissements d’assumer leur filière d’excellence, de les mettre en avant, d’en faire en interne une force de locomotion et, vis-à-vis de l’externe, une force d’attraction.

Nous nuisons aux étudiants comme à l’institution, alors qu’il suffirait de lever deux entraves réglementaires, qui procèdent d’un blocage intellectuel.

Benoît Floc’h :

Je vais vous relancer sur la sélection. Pour l’enseignement scolaire, les pays nordiques, qui ne pratiquent pas la sélection, occupent les meilleures places dans les enquêtes PISA. L’enseignement inclusif, qui accueille tous les enfants, est donc facteur de succès. Pourquoi cela serait-il différent dans l’enseignement supérieur ? En quoi le fait d’accueillir les moins bons et les meilleurs n’offrirait pas aussi une chance de faire progresser l’ensemble ?

Laurent Batsch :

C’est exactement ce que je suis en train de proposer…

Benoît Floc’h :

Non, si vous établissez une sélection, vous excluez les moins bons.

Laurent Batsch :

Il ne faut pas assimiler la sélection à l’écrémage. Pour exprimer cela autrement, il faut une certaine exigence de prérequis pour telle ou telle formation. D’ailleurs, ce que je propose de mettre en œuvre n’est pas une sélection qui exclut mais une orientation dans des voies diversifiées, nouvelles, qui permettent la réussite et la promotion de publics aujourd’hui victimes de ce que j’appelle la « centrifugeuse sociale ».

La seconde réponse consisterait à penser que le niveau de l’enseignement supérieur ne serait pas comparable à celui de l’enseignement scolaire et qu’être agrégé de mathématiques n’est réservé qu’à certains types d’étudiants. Ce n’est pas cela la démocratie sociale et l’égalité des chances.

Il faut sortir d’un certain angélisme, les enfants de tout milieu aiment être stimulés. Les enfants des milieux dits « difficiles » apprécient que l’on ait des attentes à leur égard dès leur plus jeune âge. Ils aiment la compétition et il faut la leur offrir, car ils savent réussir. Ce n’est pas en levant toute exigence que l’on démocratise socialement. La démocratie sociale, consiste à être exigeant avec des enfants dans des domaines où ils auront autant de chance de réussir que les autres, ce qui n’est pas exactement la même chose.

Benoît Floc’h :

Je passe la parole à M. Olivier Klein, Professeur d’Economie et Finance à HEC et Directeur général de la BRED. Vous pointez vous aussi les défaillances du système éducatif français, en nous incitant à nous inspirer des dispositifs existant à l’étranger pour nous améliorer. C’est bien cela ?

Olivier Klein :

Oui, absolument. Tout d’abord, je crois que nous reconnaissons tous l’importance considérable de l’enseignement et de l’enseignement supérieur. Je vais paraphraser mon ami Philippe Aghion dans une économie passée d’une phase de rattrapage à une phase d’innovation, il importe que l’enseignement supérieur soit au cœur des investissements car il est facteur de transmission et de progression du savoir.

Aujourd’hui, même si l’université française a évolué positivement depuis 20 ans, l’ensemble de l’enseignement supérieur en France pâtit encore d’inefficiences qu’il faut prendre à bras le corps. Il faut donc nous libérer de nos blocages intellectuels afin de passer du constat à l’action.

Un premier critère à prendre en compte est le niveau de nos scores PISA et PIAAC, qui mesurent l’adaptation et le niveau des personnes dans leur formation pour l’un et leur qualification au travail pour l’autre. Nos scores sont moyens. Un résultat certes pas déshonorant, mais peu valorisant dans la compétition internationale. En France, les niveaux de rémunération sont en moyenne plus élevés, nous devons donc créer davantage de valeur ajoutée pour les justifier. Cela passe par améliorer nos scores PISA ET PIAAC.

Ensuite, à l’inverse de beaucoup d’autres pays européens, notre mobilité sociale, c’est-à-dire l’égalité des chances, déjà plutôt moyenne, a encore baissé depuis plus de 10 ans. Cela se mesure par la corrélation entre le niveau des diplômes ou des revenus des parents et celui de leurs enfants. Cette corrélation malheureusement monte légèrement en France affichant ainsi une moindre mobilité sociale.

Nous ne pouvons pas nous satisfaire d’un système dans lequel l’égalité des chances baisse car la mobilité sociale crée la dynamique d’une société. Elle permet de mobiliser les ressources, les plus grandes compétences, etc. L’égalité des chances fabrique aussi la cohésion sociale. Donc c’est fondamental.

Enfin, nous critiquons parfois le classement des universités, des établissements d’enseignement mondiaux, mais ils existent. C’est un fait, et beaucoup les regardent, cela attire l’élite mondiale ou au contraire la repousse. En termes d’établissements supérieurs, la France n’est pas si bien placée, comparée aux autres pays européens. Sur les 200 meilleurs établissements supérieurs dans le monde, le Royaume-Uni en compte 34, l’Allemagne 20, les Pays-Bas 12, l’Australie (avec 22 millions d’habitants) en a 8, le Canada 7, la Suisse 7 également, la Suède 6 et la France en a seulement 5, juste avant la Corée du Sud.

La première mesure qui fonctionne ailleurs, c’est l’absence d’une spécialisation prématurée. En France, en terminale, les élèves ne savent pas nécessairement s’ils veulent faire par exemple de l’économie, du droit ou de la médecine. Or l’université française débute par la spécialisation. Il y a beaucoup d’autres pays où les études commencent par une ou deux années d’ouverture, avec une spécialisation plus tardive, une fois que l’étudiant a exploré plusieurs domaines. A mon sens, cela favorise une orientation pertinente et diminue les risques d’échec.

Le deuxième point, qui est un sujet très sensible et se heurte à un blocage intellectuel considérable en France, c’est la sélection. La sélection, cela veut dire que nous regardons comment orienter au mieux pour avoir le moins d’échecs possibles. En France, la solution par l’échec est très répandue. Plus d’un étudiant sur 2 ne passe pas en deuxième année. Parfois, seulement une quinzaine de pourcents d’étudiants d’une promotion passent en deuxième année d’université. En outre, comme le décrit aussi Laurent Batsch, les étudiants intègrent un master 1, mais la vraie sélection ne se fait que pour l’entrée en master 2. Que font les étudiants qui ne sont pas sélectionnés ? Cela n’est pas logique et démontre un problème.

Il existe également un paradoxe étonnant en France, nous refusons la sélection à l’université, mais les IUT font de la sélection, les BTS aussi. Et les entreprises apprécient ces formations. Les grandes écoles sélectionnent également et les entreprises y recrutent pour d’autres catégories d’emplois. Cela n’est pas sain, car la sélection se fait aussi à l’université, mais de façon inavouée et, encore une fois, le plus souvent par l’échec, par l’exclusion.

Qui plus est, ce n’est pas équitable. L’université possède souvent des professeurs merveilleux, des enseignants remarquables, exactement comme les grandes écoles. Sauf que dans le secteur professionnel, il existe une asymétrie d’information entre l’employé et l’employeur. Il est plus facile pour l’employé de se renseigner sur une entreprise, que pour l’employeur de savoir qui il embauche. Pour gagner du temps, l’employeur va tout d’abord sélectionner les candidats en fonction de leur cursus. Et dans ce cas, pourquoi ne pas choisir, pour plus de sécurité, un candidat sélectionné dès le début de son cursus supérieur ? Bien sûr après avoir mené son recrutement, l’employeur jugera par lui-même si la personne est compétente. Mais il a moins de chance de se tromper avec ceux déjà sélectionnés à l’avance.

D’où l’importance d’une sélection positive qui, au lieu d’exclure, oriente au fur et à mesure vers le bon cursus. Car évidemment il existe différents niveaux d’écoles, comme il y a différents niveaux d’universités. Et il faut accepter cela. Et cela permet in fine d’inclure tous ceux qui le souhaitent, sachant que tout le monde ne veut pas, mais aussi ne peut pas, devenir chercheur en physique nucléaire par exemple.

La compétition et la complémentarité entre les universités fonctionne bien dans d’autres pays. Mettre en place une compétition, c’est intelligent car cela pousse à devenir meilleur en visant l’excellence. Cela permet aussi d’intégrer largement, par différentiation. Cette concurrence conduit en effet les universités moins dotées et moins cotées à inventer pour se différencier, s’adapter à leur territoire. L’uniformité et l’égalité absolue entre universités sont juste un mythe. Tout le monde sait, notamment les employeurs, qu’il est préférable de sélectionner des étudiants issus de telle université ou de tel master spécialisé plutôt que de tel ou tel autre moins côté. Il faut donc revoir le fonctionnement de façon intelligente, dans une coopération et dans une compétition entre universités.

Je pense aussi que les professeurs doivent être évalués, en transparence, par leurs étudiants. C’est un stimulant certain pour essayer d’être un bon enseignant et toujours se remettre en question. Il y a une fierté à bien enseigner. C’est fait à l’étranger. C’est fait dans les Grandes Écoles. C’est un plus indéniable pour les étudiants eux-mêmes et la qualité de l’enseignement.

Une autre approche très efficace à l’étranger est la possibilité d’intégrer le monde professionnel après quelques année d’études puis de reprendre un cursus afin d’évoluer vers un autre domaine ou d’approfondir dans le même. Ces étudiants sont beaucoup plus décidés, motivés. Ce système permet de « raccrocher » quand le nôtre le permet peu. Et cela devrait changer.

Pour finir, je pense que l’université française ne s’est jamais beaucoup penchée sur la formation professionnelle, ce que font beaucoup les grandes écoles, à l’inverse. La formation professionnelle conduit les professeurs à toujours être en prise avec le monde professionnel. Et cela permet donc de rapprocher l’université du monde du travail, de ses exigences, voire de ses évolutions. Cela renforce aussi le lien relationnel entre l’université et le monde professionnel, ce qui permet de placer beaucoup plus facilement les étudiants sur le marché du travail. Ce lien manque aujourd’hui, alors que les grandes écoles le font très bien.

Les universités ont des atouts considérables, des professeurs remarquables, mais donnons à nos universités la chance de pouvoir donner le meilleur.

Benoît Floc’h :

Faut-il mettre davantage l’accent sur les compétences que sur les connaissances ? Faire évoluer l’évaluation à l’université pour vérifier que l’étudiant a les bonnes compétences pour entrer sur le marché du travail, plutôt que des connaissances abstraite, inutiles sans compétences développées conjointement ?

Question d’une étudiante :

Oui car, nous sommes face à d’employeurs dont les attentes sont spécifiques.

Olivier Klein :

De mon point de vue, les bonnes universités comme les bonnes écoles font inévitablement un mix. En effet, si elles se cantonnaient à un académisme détaché du monde de l’entreprise, elles produiraient uniquement des chercheurs. Évidemment le nombre de chercheurs issus de l’université est très inférieur à celui des étudiants qui se destinent à travailler dans les entreprises. Donc les établissements sont obligés d’orienter leurs études de façon à ce qu’elles correspondent à un besoin existant.

Et en même temps, les bonnes universités comme les bonnes grandes écoles évitent de s’arrêter sur une vision à court terme. Elles fournissent un savoir, des connaissances, des méthodologies intellectuelles qui permettent aux étudiants, une fois intégrés dans le monde du travail, d’évoluer plus longuement, avec plus de succès que ceux qui auront appris des « recettes de cuisine » à court terme.

Je pense donc que l’excellence vient de la capacité à donner de la profondeur et une aptitude à raisonner qui soient durables. Bien sûr, les écoles, les universités, ne doivent pas être déconnectées du monde tel qu’il est. Il faut qu’il y ait une correspondance entre l’enseignement théorique et la réalité. Mais nous ne pouvons proposer d’apprendre uniquement des notions immédiatement utiles à l’entreprise. Il faut un bon mix des deux.

Question d’un étudiant :

Je suis étudiant, en double licence droit et économie à l’Université Paris 10 – Nanterre. J’aimerais rebondir sur la question qui vous a été posée sur les connaissances et les compétences. Vous avez dit que les formations données à l’université n’étaient pas purement théoriques mais qu’elles donnaient une capacité de raisonnement. Ma question est, est-ce suffisant ? Aujourd’hui, la principale différence entre les grandes écoles et les universités est le fait que les écoles ont pour la plupart des partenariats avec de grandes entreprises, avec des universités à l’étranger qui permettent une mobilité. C’est plutôt cela qui rend ces formations plus attirantes du point de vue de l’employeur. J’aimerais votre avis M. Klein.

Olivier Klein :

C’est exact. Mais en même temps les universités ont su se doter de master, pour certains extrêmement réputés et de bon niveau, en mixant des professeurs qui font de la recherche et d’autres issus du monde de l’entreprise. Cela les a rapprochées du monde du travail. Bien sûr, si le parcours universitaire prévoyait un dispositif obligatoire, une année de césure par exemple pour tester ses connaissances dans le monde du travail, ce serait sûrement positif. Tout comme de proposer beaucoup plus d’échanges avec l’étranger. Cela enrichirait de façon considérable l’attractivité pour les employeurs.

Pour finir, la croissance inclusive, ce n’est pas refuser la sélection constructive, mais c’est refuser d’exclure trop de gens par l’échec, comme cela se fait aujourd’hui. Et si sélection il y a, elle ne doit pas être seulement faite sur la mathématique, comme le soulignait une étudiante, mais également sur l’envie, la motivation, les intérêts exprimés par la personne. Cela doit compter tout autant, comme doivent compter les connaissances et les aptitudes à raisonner.