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Inégalités des revenus : la France piégée par le traitement des symptômes et non des causes profondes

Publié dans l’Opinion , le mardi 23 septembre

La réponse aux inégalités de revenus ne peut pas consister à réparer indéfiniment les symptômes par une redistribution toujours plus forte. Le véritable enjeu pour la France est de s’attaquer aux causes profondes, à commencer par le trop faible taux d’emploi.

L’attention qui devrait être portée avec le plus grand des sérieux, en France, aujourd’hui, sur les moyens de stabiliser notre taux d’endettement public est temporairement dévié sur la question de l’égalité des revenus et de la justice fiscale. Outre qu’une encore plus forte redistribution ne résoudrait que marginalement le problème de la dette à court terme et risquerait de l’aggraver à moyen terme de par les phénomènes décrits ci-dessous, il convient d’étudier de près les inégalités de revenus en France et d’en comprendre la dynamique, avant et après répartition.

Pour ce faire, l’indice Gini est l’un des outils de référence : plus il est élevé, plus les inégalités de revenus sont fortes ; plus il est faible, plus la répartition des revenus est égalitaire.
Si l’on procède à une comparaison des pays suivants : Etats-Unis, Royaume-Uni, Allemagne, Espagne, Italie, Suède et France, avant redistribution, notre pays présente un indice Gini de 0,49, supérieur à la moyenne des trois pays les plus égalitaires de l’échantillon (0,453), et inférieur à la moyenne des trois pays les plus inégalitaires (0,517). Concrètement, l’écart entre la France et les pays les plus égalitaires est de + 0,037, tandis que l’écart avec les pays les plus inégalitaires est de – 0,027. Ce constat place la France parmi les pays où, avant impôts et allocations, les écarts de revenus sont relativement marqués.

Après redistribution, la situation est très différente. L’indice Gini tombe à 0,290, proche de la moyenne des trois pays les plus égalitaires (0,270) et bien en-deçà de celle des trois plus inégalitaires (0,353). L’écart se réduit donc considérablement à + 0,020 par rapport aux pays les plus égalitaires et s’accentue fortement à – 0,063 par rapport aux pays les plus inégalitaires. Cela traduit l’effet massif des transferts publics et du système redistributif français.

La France rejoint après redistribution les pays à plutôt faible inégalité de revenus.

Trois constats doivent être posés pour établir un diagnostic pertinent, permettant une action efficace et juste. Premier constat : la France, bien qu’ayant une assez forte inégalité de revenus avant redistribution, rejoint après redistribution les pays à plutôt faible inégalité de revenus. D’autres mesures des inégalités aboutissent aux mêmes conclusions.

Ensuite, la situation avant redistribution tient en grande partie à un taux d’emploi comparativement faible. L’indice Gini intègre en effet les revenus des chômeurs et des inactifs. Or, en France, une proportion souvent plus importante qu’ailleurs de la population en âge de travailler ne travaille pas, et ce spécifiquement chez les jeunes et chez les 60-65 ans. Cela pèse sur la mesure des inégalités initiales.

Enfin, la redistribution – l’une des plus fortes de l’OCDE – corrige très significativement ces écarts et permet ainsi d’assurer une nécessaire cohésion sociale. Mais à ce niveau, notre taux très élevé de redistribution entretient un cercle vicieux. En effet, moins le taux d’emploi est élevé, plus les inégalités avant redistribution sont fortes. Et plus la redistribution doit être massive pour jouer son rôle correcteur. Mais plus on redistribue, plus la pression des impôts et des cotisations sociales augmente, pesant sur la compétitivité des entreprises et réduisant l’attractivité du travail. Ce mécanisme alimente en retour un taux d’emploi structurellement trop faible, etc.

La réponse ne peut donc pas consister à réparer indéfiniment les symptômes par une redistribution toujours plus forte. Cela ne peut constituer une stratégie durable. Le véritable enjeu pour la France est de s’attaquer aux causes profondes, à commencer par le trop faible taux d’emploi. Un relèvement sensible du taux d’activité, qu’il s’agisse des jeunes ou des seniors, changerait profondément la donne. Il permettrait tout à la fois de réduire les inégalités de revenus avant redistribution, de renforcer notre potentiel de croissance et de soulager nos finances publiques. Selon des estimations très prudentes, un relèvement du taux d’emploi au niveau de celui de l’Allemagne (en prenant en compte la moindre productivité des derniers entrés sur le marché du travail et les différences de temps partiel) pourrait en effet réduire de moitié le déficit public primaire du pays.

La redistribution en France est donc un instrument essentiel de solidarité. Mais elle agit comme un palliatif, non comme un remède préventif. Pour éviter que ne se referme indéfiniment le cercle vicieux du « faible emploi –inégalités – renforcement de la redistribution – perte additionnelle de compétitivité des entreprises et d’attractivité du travail – taux d’emploi trop faible », le pays doit augmenter durablement son taux d’emploi. C’est à cette condition, notamment, que la cohésion sociale sera assurée de façon soutenable et durable avec un niveau d’inégalité des revenus plus faible avant même redistribution, que notre PIB par habitant ne s’abaissera plus régulièrement par rapport à celui de ses voisins, et que nos finances publiques auront une bien meilleure chance d’être consolidées. Se tromper de diagnostic en ne se concentrant que sur la redistribution conduirait inexorablement à abîmer tant l’économique que le social.

Olivier Klein est professeur d’économie à HEC

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Le modèle social et économique français est insoutenableI

Il serait plus que hasardeux de prétendre que la France n’a pas un sérieux problème d’endettement public. Et que son modèle social et administratif n’exige pas de profondes réformes pour être soutenable. Certes, la catastrophe sur les marchés n’est probablement pas à craindre immédiatement du seul fait de la situation financière de la France, notamment grâce à la protection offerte par l’euro. Mais un chaos politique durable et sans issue prévisible pourrait éventuellement la déclencher.
Quoi qu’il en soit, l’enjeu est d’agir profondément et rapidement pour restaurer la soutenabilité de notre modèle économique et social, aujourd’hui à bout de souffle. Et de constater que la montée fulgurante des intérêts de la dette publique, notamment dès 2026, alourdira encore considérablement l’équation budgétaire.

Le décrochage français

Notre PIB par habitant baisse de plus en plus vis-à-vis de celui de ses voisins. En 2024, l’Allemagne est à 116,2 % du PIB par habitant de la France contre 105 % en 2000, les Pays-Bas à 136,4 contre 114, le Danemark à 129,3 contre 117,8 et la Suède à 114,1 contre 100, par exemple. Ce grave décrochage, opéré sur un peu plus de vingt ans, traduit un affaiblissement de la compétitivité et un essoufflement du modèle productif français.

Parallèlement, depuis 2000, la dette publique française est passée de 59 % à 113 % du PIB, soit +54 points. Contre celle de la zone euro hors France qui n’a augmenté que de 17 points, de 70 % à 87 % du PIB. Sans pour autant booster la croissance française puisqu’elle a été légèrement plus faible sur la période que dans le reste de la zone euro hors France.

Le taux de prélèvements obligatoires a atteint 45,3 % en France en 2024, contre 40,3 % pour l’Allemagne, 40,6 % pour la zone euro hors France et 34 % en moyenne dans l’OCDE. Sans mentionner même la suradministration et la surréglementation croissantes qui pèsent chez nous également sur la compétitivité et l’esprit d’entreprise. Et nous avons comparativement un trop faible taux d’emploi (68 %, lorsque les pays d’Europe du Nord et l’Allemagne sont entre 75 et plus de 80 %) ; le taux d’emploi étant très corrélé notamment avec le taux de cotisation sociale payé par les entreprises, mais aussi avec les règles de départ en retraite.

Parallèlement, la part des exportations françaises de marchandises dans les exportations totales de la zone euro est ainsi passée de 16 à 11 %, soulignant une dégradation significative de la compétitivité de notre industrie.

Il est à noter en outre que le taux de redistribution en France est l’un des plus élevés au monde. L’écart des revenus des 10 % les plus aisés avec les 10 % les moins aisés passe ainsi après redistribution élargie (d’après un calcul de l’INSEE) de 18 à 3. Quant aux 1 % les plus aisés, ils reçoivent en France 7,2 % du revenu des ménages, contre en Suède 8,7 %, en Italie 10,3 % et aux Etats-Unis 14,4 %.

Enfin, les dépenses publiques en France représentent 57,1 % du PIB en 2024, loin devant l’Allemagne (49,5 %), la zone euro hors France (49,6 %) et l’OCDE (42,6 %). Et il n’y a pas à long terme de corrélation positive sur l’ensemble des pays de l’OCDE entre le taux de dépenses publiques et le taux de croissance. Au-delà d’un certain seuil, au contraire même.

Travailler et produire plus

Faut-il vraiment ignorer ces chiffres et proposer contre toute évidence d’accroître encore les taux de prélèvements et des dépenses publiques, en lieu et place de les abaisser ? Peut-on sérieusement éviter de comprendre que la bonne réponse en France est l’accroissement de la richesse produite et non davantage encore de redistribution ? Que le problème vient aussi du manque de quantité de travail tant en durée annuelle qu’au long de la vie ? Sans comprendre que ce manque ne permet le soutien de notre niveau de vie et de protection sociale qu’en nous endettant toujours plus ?

Nous devons parler vrai et agir juste pour éviter le déclin accéléré de notre modèle économique et social. Et ces constats ne sont ni de droite ni de gauche. Comme le rappelait Pierre Mendès France : « Les comptes publics en désordre sont le signe des nations qui s’abandonnent. »

Olivier Klein est professeur d’économie à HEC.

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Budget Bayrou : nécessaire, quoi qu’il arrive

Publié dans Les Échos le 28 août 2025

Il était urgent de marquer un coup d’arrêt à une forte dérive fragilisant depuis trop longtemps notre équilibre économique et social. Le temps de l’inaction est révolu, quelles que soient les issues politiques à l’Assemblée.
Le budget doit s’inscrire dans une stratégie cohérente, pensée pour durer, ce qui est une gageure aujourd’hui en France. Il est indispensable d’élaborer un plan cohérent et détaillé de transformation de l’Etat et des collectivités locales pour les rendre moins lourds, moins redondants et plus efficaces. L’ingénierie et l’accompagnement du changement seront aussi cruciaux pour la réussite de cette transformation.

En responsabilité

Il est également urgent de repenser notre Etat-providence pour le rendre pérenne. Cela passe par une responsabilisation accrue de chacun face à ce bien commun fondamental, en encourageant un recours raisonné à la Sécurité sociale, en évitant la surconsommation de soins ou de prestations, par une contribution individuelle, fût-elle très modeste, pour limiter les abus sans remettre en cause la solidarité. La quantité de travail en France, tant le taux d’emploi que le nombre d’heures travaillées, doit être structurellement augmentée. Si nous avions le taux d’emploi allemand, nous n’aurions plus de déficit public primaire ni de problème de financement de notre protection sociale.
L’actuel projet de budget esquisse ces sujets. Les dépenses publiques continueraient d’augmenter en 2026, mais de 1,8 % au lieu des 3,5 % à 4 % initialement prévus. Cela constituerait une avancée, mais ne serait pourtant pas une réduction telle que la pratiquent les entreprises qui ont besoin d’abaisser leurs coûts. Les critiques contre l’ultralibéralisme de ce projet de budget, outre qu’elles ratent l’urgence du redressement nécessaire, sont donc sans objet. En outre, certaines baisses affichées ne sont en réalité que des hausses d’impôts déguisées, comme la suppression de la franchise de 10 % pour les retraités ou celle de niches fiscales.

Réformer

Le principe enfin selon lequel « tout le monde doit participer à l’effort » semble juste, mais il doit être appliqué avec discernement. Il est crucial de corriger prioritairement les dérives là où elles sont apparues et non de façon indifférenciée, au risque d’être injuste et d’affaiblir l’adhésion à la réforme.

Quant à l’idée selon laquelle ces efforts ne peuvent être acceptés que si l’on améliore la justice fiscale, elle doit être replacée dans le contexte français. Notre pays est déjà l’un des plus redistributifs de l’OCDE. L’écart de revenus en France passe d’un facteur 18 à 3, après redistribution. Les taux d’imposition sur les plus hautes tranches de revenus sont parmi les plus élevés en Europe, tandis que ceux sur les plus bas revenus imposés figurent parmi les plus faibles. Et 55 % des ménages français ne paient pas d’impôts sur le revenu, alors que 10 % paient 75 % du total.

Plus généralement, accroître encore les prélèvements obligatoires, déjà au sommet de l’OCDE, découragerait davantage l’investissement, l’emploi et la prise de risque entrepreneuriale. L’équilibre nécessaire exige un pragmatisme équitable, qui concilie impératifs sociaux et solidité économique, n’aggravant pas le manque d’attractivité du travail ni l’insuffisance de compétitivité.

Ce projet de budget pourrait donc constituer un début nécessaire, bien qu’insuffisant, si le vote de confiance ne le rendait pas vain. La France n’échappera pas, quoi qu’il en soit, à une impérative vision à long terme intégrant enfin que le pays ne peut vivre durablement sur un endettement sans cesse en hausse et une insuffisante création de richesse. Sachons faire des réformes structurelles courageuses, avant qu’on ne nous les impose. Cessons d’amplifier le cercle vicieux français : une augmentation permanente des prélèvements, des dépenses non contrôlées, le tout à des niveaux mondiaux plafonds et se soldant par un taux d’endettement à la trajectoire non maîtrisée et très périlleuse.

Olivier Klein est professeur d’économie à HEC.

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Crise économique et financière Economie Générale

Europe : comment financer son avenir pour s’imposer comme puissance dans ce nouveau monde ?

Comment financer son avenir pour continuer d’exister ? Cette question hante désormais les décideurs et économistes européens. Les besoins d’investissement sont colossaux si l’Europe veut rivaliser avec les États-Unis et la Chine. Lors de l’émission Les décideurs engagés dans la banque et l’assurance (IFPASS / L’Hémicycle), Olivier Klein, professeur à HEC et DG de Lazard Frères Banque, a livré sa vision.

L’Union européenne, longtemps focalisée sur la régulation et la norme, se réveille avec un tissu industriel affaibli et une dépendance stratégique croissante. Selon le rapport Draghi, il manquerait environ 800 milliards d’euros d’investissements. « Ce chiffre est largement sous-estimé », alerte Olivier Klein, rappelant que l’Allemagne à elle seule a déjà débloqué une somme équivalente.

Trois grands défis s’imposent. D’abord, le climat. La transition énergétique exige des investissements massifs pour bâtir des filières locales, décarbonées, compétitives, incluant un retour en grâce du nucléaire. Ensuite, la technologie : en intelligence artificielle, semi-conducteurs ou cloud, l’Europe est à la traîne. « Mieux vaut se positionner en amont, sur l’informatique quantique par exemple », propose Klein. Enfin, la défense : la montée des tensions géopolitiques relance le besoin de réarmement et de souveraineté industrielle.

L’erreur stratégique ? Avoir cru qu’un leadership normatif suffisait à peser dans le monde. L’exemple de l’automobile est frappant : en interdisant trop vite les moteurs thermiques, l’Europe a favorisé les véhicules électriques… dont la Chine domine la production de batteries.

« L’Europe est un continent vieillissant, où la culture de la précaution a supplanté celle du risque », constate Olivier Klein. Résultat : des gains de productivité deux fois moindres que ceux des États-Unis depuis vingt ans. À cela s’ajoute une fragmentation réglementaire : malgré le marché unique, des barrières non tarifaires subsistent, équivalant à 45 % de droits de douane internes, selon le rapport Drahi.

Peut-on tout résoudre avec un marché financier unifié ? Pas uniquement. Avant même la crise de la zone euro, les capitaux circulaient efficacement entre pays. Aujourd’hui, l’épargne excédentaire de l’UE (plus de 400 milliards d’euros en 2024) fuit vers les États-Unis, plus dynamiques et rentables.

Comment la retenir ? En réformant la réglementation, en simplifiant l’administration, en valorisant la réussite économique. Il faut aussi transformer une épargne longue et prudente en capital productif. Cela passe par une réforme des retraites – en liant l’âge au progrès de l’espérance de vie – et la création de fonds de pension. Des ajustements techniques comme la réforme de la fiscalité de l’assurance-vie, l’élargissement du PEA ou des incitations à l’épargne longue sont également nécessaires.

Dans un monde où la régulation s’effondre au profit des rapports de force, l’Europe ne peut plus rester passive. Si elle ne renforce pas rapidement sa puissance économique, technologique et militaire, elle restera coincée entre les États-Unis et la Chine. Et continuera à s’effacer sur la scène mondiale. « Lorsque j’étais à la tête de la BRED et que je visitais nos filiales dans les pays émergents, on me demandait souvent : où est l’Europe ? », conclut Olivier Klein. Il est temps de répondre.

Sybil Rizk 

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Quelques vérités pour sortir de l’impasse française

L’opinion , le 16 juin

L’économique et le social ne peuvent être dissociés. Leurs interactions peuvent engendrer des effets positifs comme désastreux, parfois à rebours des intentions initiales. La France en offre une illustration frappante. Malgré un niveau de prélèvements obligatoires et de redistribution parmi les plus élevés de l’OCDE, la tentation persiste de les faire croître encore.
Pourtant, une telle trajectoire compromettrait l’emploi, la compétitivité, l’entrepreneuriat et l’incitation au travail. Or, c’est précisément l’emploi, allié à la croissance, qui constitue le levier le plus efficace contre la pauvreté, pour la mobilité sociale, pour la soutenabilité de notre niveau de vie comme de notre protection sociale. Le social ne peut ainsi être protégé ou s’améliorer durablement sans le développement d’une économie solide.

L’accroissement perpétuel du taux d’endettement ne peut que provoquer tôt ou tard une crise économique, sociale et financière majeure. Attention à la dynamique incontrôlée, donc très dangereuse, dans laquelle nous sommes aujourd’hui. De 1997 à 2024, le taux d’endettement de la France a cru de 50 points de PIB alors que celui de la zone euro ne progressait que de 15 points.

Il en va de même pour la relation entre l’offre et la demande. Si la croissance de la demande est nécessaire à une économie robuste, elle ne peut être durablement soutenue si l’offre nationale ne progresse pas en parallèle. La France affiche déjà un déficit commercial persistant, symptôme d’une compétitivité insuffisante. Augmenter la demande sans redresser l’offre aggraverait cette fragilité, creusant la dépendance financière vis-à-vis de l’étranger.

Ce n’est pas en augmentant encore les prélèvements que l’on sortira du piège français. Au contraire, il s’agit de relancer la dynamique productive
L’erreur serait de croire qu’un activisme budgétaire, financé par toujours plus d’impôts ou de dettes, permettrait de créer une prospérité durable. Tout au contraire. Le taux de croissance sur long terme au sein de l’OCDE est corrélé légèrement négativement avec le taux moyen de dépenses publiques sur PIB. Cela ne remet en aucun cas en cause l’intérêt réel d’une politique budgétaire contracyclique, mais interdit de penser, comme trop souvent en France, que tout problème doit et peut être résolu en permanence par davantage de dépenses publiques. Au-delà d’un certain seuil déjà dépassé chez nous, tout au contraire.

Il faut donc inverser la logique. Ce n’est pas en augmentant encore les prélèvements que l’on sortira du piège français. Au contraire, il s’agit de relancer la dynamique productive : investir dans l’innovation technologique et écologique, rendre le travail plus attractif, lever les obstacles à la mobilité sociale, encourager les entreprises à croître par moins de taxation et de sur-réglementations, améliorer l’efficacité de notre enseignement, augmenter le taux d’emploi tant pour les jeunes que pour les 60-65 ans, etc.

C’est cette stratégie, couplée à une baisse du taux des dépenses publiques et à une amélioration de leur efficacité, qui permettra d’augmenter notre potentiel de croissance et d’élargir la base imposable, donc les recettes publiques, sans avoir à relever les taux de prélèvements obligatoires. Tout autre choix ne ferait qu’accentuer le cercle vicieux : plus de charges sur une base économique fragilisée, donc moins de création de richesse, donc une nouvelle augmentation du taux de prélèvements pour tenter de compenser une base fiscale affaiblie, et ce dans une spirale sans fin. Abîmant ainsi tout à la fois l’économie et le social. Affaiblir l’économie, c’est fragiliser à brève échéance encore davantage le modèle social lui-même.

Olivier Klein est professeur d’économie à HEC.

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L’évolution géo-politique et géo-économique du monde, décrochage européen et finances publiques françaises en danger.