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Eléments de réflexion pour le développement d’une banque de détail

Le marché de la banque de détail est aujourd’hui saturé en Europe, et plus particulièrement en France avec un taux de bancarisation de plus de 98%. Ceci se traduit par une difficulté structurelle des banques à faire croître leur PNB et ceci d’autant plus dans un marché dont le taux de croissance tant économique que démographique est particulièrement faible.

La seule possibilité de croissance pour les banques de détail est alors de prendre des parts de marché les unes aux autres, exercice particulièrement difficile dans un marché bancaire qui restait assez figé jusqu’à maintenant.

Cependant, avec la crise de 2008 et ses effets sur l’image des banques auprès des consommateurs, ainsi qu’avec la généralisation des effets de la révolution technologique en cours, un mouvement autour du consommateur se met progressivement en place. Or tout mouvement en profondeur peut permettre de remettre en cause les positions acquises.

Au-delà des impacts de la crise financière, la révolution technologique induit deux révolutions qui touchent aujourd’hui profondément le métier de banque de détail en modifiant les relations entre banque et client et banque et fabricant de produits :

La révolution technologique donne au client un nouveau pouvoir dans sa relation avec sa banque

Mieux informé, plus exigeant, le client bancaire qui a trouvé une certaine facilité dans la consommation de produits et services bancaires avec les nouvelles technologies peut aujourd’hui plus facilement qu’hier comparer, utiliser plusieurs enseignes, voire changer de banque en fonction de l’image, des prix ou de la qualité de ces dernières.

La révolution technologique donne également un pouvoir au distributeur sur le producteur

Les nouvelles technologies modifient profondément l’équilibre des relations entre la banque et son client, mais elles modifient tout autant, la relation entre le producteur et distributeur de produits et services bancaires, en donnant un net avantage au distributeur sur le producteur.

Ces deux mouvements vont profondément bouleverser les équilibres du secteur, et l’intérêt de chacun des acteurs bancaires sera d’être en anticipation de ces mouvements, car ils offrent aux banques qui sauront les anticiper, une occasion unique de prendre plus facilement des parts de marché. Dans un environnement en mouvement fort et rapide, le risque de perdre des parts de marché est plus grand et l’opportunité d’en gagner n’a jamais été aussi forte.

D’où l’intérêt de bien prendre la mesure de ces deux révolutions et de bien prendre la crête de la vague.

1er mouvement de fond: la révolution client

Le client peut désormais, et de plus en plus facilement, acheter tous les produits et services bancaires de son domicile, sans se déplacer en agence. Il peut comparer les services offerts par chacun et les prix pratiqués. Il est encouragé dans ce choix par le développement rapide de l’e-commerce qui permet aujourd’hui d’acheter via internet tous les produits de consommation courante (vêtements, décoration …) mais aussi les loisirs (musique, livre,…) et même les services (ménage, cours des enfants, voyages…).

Il n’y a aucune raison que les produits et services bancaires restent en retrait de ce mouvement, alors même qu’ils sont dématérialisés. En outre, l’e-commerce est le seul secteur à ne pas subir les effets de la crise.

Dans ce cas, quelles seront les conséquences et impacts sur l’organisation, les métiers bancaires et la configuration et rôle des agences.

  1. Les clients ne viendront plus en agence pour des opérations simples et par conséquent, toutes les opérations transactionnelles et de flux ne se feront plus que depuis le domicile du client ainsi que par téléphone, ou par internet ou éventuellement directement sur les GAB. En conséquence, les métiers liés aux opérations transactionnelles et aux ventes simples se réduiront progressivement. Etre guichetier ou même commercial sans portefeuille dans une agence ne sera plus un métier demain. Seuls des métiers de responsables de clientèle (gestionnaire d’un portefeuille de clients), junior et senior, subsisteront.
  2. D’une part, l’agence traditionnelle devra être repensée comme étant également une e-agence, et chaque commercial devra développer les techniques et compétences pour être en mesure de réaliser des ventes simples, rapides, par téléphone avec des clients se déplaçant peu ou pas du tout. Les centres d’appel et autres banques multimédia n’ont pas la capacité de réaliser toutes les opérations distantes des banques et surtout n’offrent pas de relations personnalisées. Cela sera le rôle des agences, et de chaque commercial, d’être, chacun à son niveau et sur son fonds de commerce une petite e-agence, avec les impacts d’outils et d’organisation que cela nécessite.
  3. D’autre part, les besoins du client nécessiteront un développement rapide et important du niveau de compétence de chaque commercial. D’autant que de très nombreux clients montent leur niveau d’exigence, que certains sont de plus en plus informés et que tous attendent en l’exprimant de plus en plus fortement des conseils plus appropriés et personnalisés de leur banquier. Le client aura toujours besoin, à certains moments clé, de conseils à valeur ajoutée, c’est-à-dire pour les opérations patrimoniales importantes pour lui, à impacts financiers, juridiques ou fiscaux complexes, opérations qui nécessiteront un rendez-vous en face à face. De plus en plus, ces rendez-vous ne seront plus que les seules occasions du client de se déplacer dans une agence. Il sera donc essentiel de développer un niveau d’expertise en matière de montage et d’assemblage de produits et services très élevé. Les commerciaux devront alors être en mesure de trouver et proposer les montages ad hoc et de bien conseiller leur client, mais aussi au préalable d’avoir bien identifié et compris le besoin du client et de son foyer. De cette capacité à comprendre et proposer des ensembles de produits et services adaptés aux besoins de chaque client dépendra notre capacité à accompagner cette révolution client, et à faire la différence parmi les acteurs bancaires.
    Il s’agit ici de vendre mieux, et c’est en faisant mieux que l’on vendra plus, sans travailler davantage mais en travaillant autrement, avec plus de connaissance des clients, mais aussi de l’ensemble de la gamme des produits et services offerts, des assemblages et des montages possibles.
    Les liens entre producteur et distributeur peuvent ainsi se distendre, préfigurant ainsi dans certains cas la fin de l’intégration de tous les métiers dans un même groupe bancaire ou, pour un groupe bancaire intégrant banquiers-distributeurs et producteurs, l’organisation progressive de l’ouverture parallèle et négociée de son réseau banquier-distributeur à d’autres partenaires producteurs et de ses producteurs à d’autres banquiers-distributeurs.
    La fonctionnalité recherchée par le client prime ainsi peu à peu sur le produit à vendre, poussant le distributeur à assembler au mieux pour le client des bouquets composés des produits et services ad hoc, fabriqués, le cas échéant, par des producteurs divers et variés.
    Dans ces deux révolutions client et distributeur, les changements seront rapides et profonds. La capacité à nous adapter dépendra d’un maillon essentiel dans les entreprises de distribution à réseau comme les banques de détail. Ce maillon, c’est est le manager de proximité, le directeur d’agence. Pour qu’il réussisse pleinement son travail d’accompagnement auprès de ses équipes et d’adaptation des méthodes de travail à ces évolutions, il est nécessaire de renforcer son autonomie, ses capacités d’initiatives. Ces dernières sont d’autant plus nécessaires que le banquier-distributeur est encore davantage entrepreneur qu’auparavant. Il lui faut créer des solutions en « one to one », pour chaque client, mais en étant organisé de la façon la plus industrielle possible. Le taylorisme de la vente des produits aux clients par le distributeur cède ainsi la place aux équipes légères, habiles et entrepreneuriales, appuyés par des organisations elles-mêmes très industrialisées.
  4. La révolution client ne se traduira pas par une spécialisation produit des commerciaux, les clients en effet attendent de leur conseiller une relation globale et personnalisée.
    Au contraire, la révolution client développera une expertise de chaque commercial sur l’ensemble de la gamme pour pouvoir apporter une réponse complète et globale aux besoins des clients. Il s’agit ici de se rapprocher un peu des métiers de gestion de patrimoine, tout en concentrant ces derniers sur les clients à plus fort patrimoine. Il sera nécessaire de développer la formation des commerciaux des agences pour qu’ils deviennent d’excellents généralistes et de développer, en appui des commerciaux, de l’expertise produit ou solution à distance, au siège par exemple.
    L’enjeu de la révolution client pour une banque de réseau est de passer d’une approche centrée sur le produit à une approche centrée sur le client afin de ne pas perdre la bataille du « consom’acteur ». Il faudra donc être en mesure de lui apporter de la valeur ajoutée avec des généralistes, compétents, aguerris, appuyés par des spécialistes produits ou solutions en ligne au siège afin d’apporter le plus rapidement possible la meilleure combinaison possible au client. Tout en faisant converger simultanément les modèles d’agences physiques et ceux des e-agences, avec des commerciaux attitrés, en mesure de vendre, en tant que de besoin, à distance.

2ème mouvement de fond : la révolution distributeur

L’économie classique est une économie tirée par le produit. La chaîne de valeur classique est celle qui part du fabricant, qui propose ses produits à des distributeurs, qui eux-mêmes vendent ces produits à leurs clients.

La révolution technologique en cours entraîne une inversion de cette chaîne. On vend aujourd’hui, en effet, moins de téléphones portables que des solutions ou des forfaits donnant accès à des services qui comprennent les appareils. Dans le même esprit IBM s’est massivement retiré de la production des machines pour se concentrer sur la vente de solutions. Le cloud computing se développe. Le service du transport automobile tendra peut être à se substituer peu à peu à la détention en propre de véhicules.

Dans cette inversion de la chaîne, celui qui connaît et fidélise le client devient davantage maître du jeu. Cette révolution donne ainsi aux réseaux de distribution une place de choix, une place nouvelle, de par la maîtrise de la connaissance du client qu’offrent le savoir-faire et la technologie du distributeur.

En effet, les données clients, si prec1euses, sont maintenant non seulement stockées, mais analysées, transformées, et peuvent être de plus en plus traduites en trajectoires de consommation, attentes clients potentielles, événements de consommation. La maîtrise de ces données permet ainsi une véritable gestion de la relation client (Customer Relationship Management : CRM). Ce sont autant d’éléments dont ne disposent pas les producteurs et qui permettent d’équiper et de répondre aux attentes des clients dans de meilleures conditions. En passant d’une économie du produit, à une économie fondée sur la relation client, qui recherche la valeur client, la fonctionnalité pour le client, le distributeur fera la différence vis-à-vis de ses concurrents, mais aussi des fabricants. Pour cela il devra utiliser cette connaissance et se mettre en situation de proposer une offre spécifique et adaptée à chaque client. Les commerciaux bancaires, seront ainsi responsables de la mise en place, avec leur client, de la solution, de la combinaison de produits et de services, qui convient le mieux, en agissant en conseil avisé non pas pour le compte de, mais avec son client « consom’acteur » ici encore.

Cela implique de développer encore davantage les systèmes de connaissance clients, mais aussi et surtout se mettre en capacité de proposer les meilleurs combinaisons de produits et services en fonction de chaque client. Cela peut aller bien entendu jusqu’à proposer des produits non conçus par le Groupe bancaire auquel appartient le commercial. La fonction du distributeur est alors d’être un monteur de solutions adaptées, un assembleur intelligent et pertinent des produits et services co-choisis avec le client.

Les liens entre producteur et distributeur peuvent ainsi se distendre, préfigurant ainsi dans certains cas la fin de l’intégration de tous les métiers dans un même groupe bancaire ou, pour un groupe bancaire intégrant banquiers-distributeurs et producteurs, l’organisation progressive de l’ouverture parallèle et négociée de son réseau banquier-distributeur à d’autres partenaires producteurs et de ses producteurs à d’autres banquiers-distributeurs.

La fonctionnalité recherchée par le client prime ainsi peu à peu sur le produit à vendre, poussant le distributeur à assembler au mieux pour le client des bouquets composés des produits et services ad hoc, fabriqués, le cas échéant, par des producteurs divers et variés.

Dans ces deux révolutions client et distributeur, les changements seront rapides et profonds. La capacité à nous adapter dépendra d’un maillon essentiel dans les entreprises de distribution à réseau comme les banques de détail. Ce maillon, c’est est le manager de proximité, le directeur d’agence. Pour qu’il réussisse pleinement son travail d’accompagnement auprès de ses équipes et d’adaptation des méthodes de travail à ces évolutions, il est nécessaire de renforcer son autonomie, ses capacités d’initiatives. Ces dernières sont d’autant plus nécessaires que le

banquier-distributeur est encore davantage entrepreneur qu’auparavant. Il lui faut créer des solutions en «one to one», pour chaque client, mais en étant organisé de la façon la plus industrielle possible. Le taylorisme de la vente des produits aux clients par le distributeur cède ainsi la place aux équipes légères, habiles et entrepreneuriales, appuyés par des organisations elles-mêmes très industrialisées.

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Banque Crise économique et financière

La crise financière : du neuf avec du vieux

Dossier : les institutions financières dans la crise

Les crises financières se répètent, montrant à chaque avènement une similarité fondamentale de leurs origines et de leur déroulement, mais aussi leur caractère spécifique. Toute crise financière prend l’une au moins des trois formes canoniques que l’histoire nous a fait connaître régulièrement depuis le XIXe siècle. Souvent elle prend chacune des trois formes successivement ou simultanément. L’analyse qui suit s’inspire notamment des travaux de Michel Aglietta et des économistes de la Banque des règlements internationaux.

La première forme de toute crise bancaire, aujourd’hui comme hier – on peut même dire que c’est la forme la plus ancienne de crise –, est la crise de spéculation. Pourquoi les actifs patrimoniaux (actions, immobilier, or, etc.) peuvent-ils faire l’objet de bulles spéculatives ? Parce que leur prix, contrairement à celui d’un bien ou d’un service industriel ou commercial reproductible, ne dépend pas de leur coût de revient, de ce que les économistes appellent leur coût marginal. C’est pourquoi il peut s’éloigner fortement de leur prix de fabrication.

Asymétries

Le prix d’un actif financier dépend en fait fondamentalement de la confiance que l’on place soi-même dans la chronique des revenus futurs qu’il peut engendrer, une chronique promise par son émetteur. Mais la détermination du prix dépend aussi de ce que chacun anticipe quant à la confiance des autres accordée à cette promesse. Chacun raisonnant de la sorte.

Pour peu que les informations ne soient pas bien partagées (entre le prêteur et l’em-prunteur, l’actionnaire et le management, ou entre les acteurs de marchés eux-mêmes) et que le futur soit difficilement probabilisable, ces asymétries d’informations et cette incertitude fondamentale favorisent le mimétisme des acteurs. Il est alors, en effet, très difficile de connaître la valeur intrinsèque de l’actif considéré, et, de ce fait, de parier sur elle. En ce cas, le sens du marché est donné par les autres, car il est le pur produit de l’expression de l’opinion majoritaire qui se dégage. Les acteurs s’imitent rationnellement, afin de tenter d’anticiper et de jouer les tendances du marché, de façon totalement autoréférentielle. C’est ainsi que peuvent se développer des bulles spéculatives fortes et durables. Ces bulles finissent par se « crever » soudainement, au moment du retournement de l’opinion majoritaire, dans un mouvement encore plus fort que celui qui a caractérisé la phase précédente.

Le sens du marché est le pur produit de l’expression de l’opinion majoritaire qui se dégage.

Euphorie

La deuxième forme, la crise de crédit, vient quant à elle du fait que, dans une longue période de croissance, tous (banques et emprunteurs) oublient progressivement la possi-bilité de survenance des crises et finissent par anticiper une expansion sans limite. Dans cette phase euphorique, les prêteurs diminuent dangereusement leur sensibilité au ris-que et le niveau de levier (dettes sur niveau de richesse ou de revenus pour les ménages ou d’actif net pour les entreprises) finit par atteindre des seuils que tout observateur objectif est amené à considérer comme déraisonnable. Et ce phénomène s’amplifie considérablement encore lorsque les prêteurs apprécient la solvabilité des emprunteurs non plus à l’aune de leurs revenus futurs probables, mais à l’aune de la valeur antici-pée des actifs (actions ou immobilier notamment) financés ou qui servent de garantie. Enfin, bien souvent, pendant cette phase, ils acceptent, par le jeu concurrentiel, des marges qui ne couvriront pas le coût du risque de crédit à venir. La situation financière des agents économiques se révèle extrêmement vulnérable lorsque le retournement conjoncturel intervient. Aussi, au moment de la crise, les prêteurs (banques et marchés) reconsidèrent-ils brutalement le niveau de risque encouru, et par un effet symétrique du précédent, inversent-ils fortement leur pratique d’attribution du crédit, tant en termes de volume que de marge, jusqu’à provoquer un credit crunch – ou resserrement du cré-dit –, qui va lui-même amplifier la crise économique qui l’a suscité.

Défiance

Troisième forme canonique de la crise : la crise de liquidité. Lors de certains dérou-lements dramatiques des crises financières, une défiance contagieuse apparaît. C’est typiquement le cas dans la crise financière et bancaire que nous connaissons aujourd’hui. Cette défiance induit pour certaines banques une course fatale de leurs clients aux retraits des dépôts (ce que les spécialistes appellent un « bank run »).

Elle peut également conduire à une raréfaction, voire une disparition, de l’intention des banques de se prê-ter entre elles, de par la crainte de faillites bancaires en chaîne. Cette illiquidité du marché du financement interbancaire – sans intervention des Banques centra-les en tant que prêteurs en dernier ressort – produit les faillites tant redoutées. En outre, d’autres formes d’illiquidité peuvent se produire. Certains marchés financiers, liquides hier, peuvent se révéler soudainement illiquides, tant la notion de liquidité de marché, telle que l’a analysée André Orléan, est là encore hautement autoréférentielle. Un marché n’est liquide que si tous les acteurs pensent qu’il l’est. Si une méfiance sur sa liquidité s’installe, tous les acteurs se trouveront alors vendeurs pour sortir de ce marché, pro-voquant du même coup, de façon endogène, son illiquidité. Dans la crise actuelle, le cas le plus emblématique est le marché des ABS (asset-backed securities, en français « titres adossés à des actifs », c’est-à-dire fondamentalement les actifs titrisés).

Un marché n’est liquide que si tous les acteurs pensent qu’il l’est.

Une chose entraîne l’autre

Ces trois types de crises s’entrelacent souvent et s’entraînent mutuellement dans une situation qui devient alors critique. À titre d’exemple, le crédit peut se développer trop rapidement, de par la croissance elle-même anormalement élevée des prix des actifs patrimoniaux qui servent de garantie à ces crédits. Et les prix de ces actifs s’emballent eux-mêmes, car des achats additionnels sont permis par des crédits plus faciles. On obtient là un phénomène de divergence auto-entretenue et potentielle-ment durable dans des marchés qui ne s’équilibrent pas par eux-mêmes à des niveaux « normaux ». De même, la crise de liquidité est-elle engendrée, par exemple, par une crainte soudaine sur la valeur des créances bancaires et des actifs financiers que les établissements financiers détiennent.

À la recherche de liquidité, les banques vont alors moins financer l’économie et tenter de céder leurs actifs. Ce qui aggrave à son tour la crise spéculative comme la crise du crédit. La grande crise qui a commencé concrètement en 2007 est, comme les crises précédentes, la combinaison de ces trois formes. Une bulle spéculative immobilière tout d’abord, notamment aux États-Unis, au Royaume-Uni et en Espagne. Une crise du crédit ensuite, due à une hausse dangereuse du taux d’endettement des ménages dans ces mêmes pays et à un effet de levier très élevé des banques d’investissement, des entreprises en LBO et des hedge funds notamment. Une crise de liquidité, enfin, des marchés de produits de titrisation et du refinancement interbancaire, due aux perturbations issues de la faillite de Lehman Brothers. Chaque crise renforçant les deux autres, dans un processus auto-entretenu.

Ce qui ne se voit pas

La composante idiosyncratique de la crise actuelle, quant à elle, repose sur le déve-loppement rapide, ces dernières années, de la titrisation des créances bancaires.

La titrisation sort du bilan des établissements de crédit des créances bancaires sur des particuliers, des entreprises, comme des collectivités locales. Ces créances sont regroupées de façon souvent hétéroclite dans des supports eux-mêmes à fort effet de levier, supports revendus à d’autres banques, aux assureurs comme à des fonds de placement, c’est-à-dire in fine à tout un chacun.

La titrisation a permis un accrois-sement important du financement de l’économie mondiale, puisqu’elle autorisait les banques à réaliser bien davantage de crédits que si elles avaient dû les conserver à leur bilan. Mais cette technique a incité les banques qui l’utilisaient le plus (notam-ment aux États-Unis) à abaisser considérablement leur niveau de sélection et de suivi des emprunteurs et à accepter de prêter à des agents de moins en moins solvables, puisqu’elles n’encouraient plus aucun risque après titrisation. C’est ainsi, par exemple, que les encours de crédits subprime se sont multipliés, amplifiant considérablement la crise de crédit qui s’est fait jour après l’éclatement de la bulle immobilière.

La titrisation non régulée a ainsi considérablement aggravé la crise de crédit, mais aussi de liquidité. En effet, la difficile traçabilité de ces crédits et le mélange de bons et de mauvais crédits dans les mêmes supports, comme l’opacité et la complexité (CDO de CDO…) des produits titrisés ont, à leur tour, aggravé l’ampleur de la crise elle-même. Chacun n’ayant plus confiance dans la qualité, ni même dans sa compréhen-sion de ce type de placements, la liquidité s’est trouvée brutalement tarie. Par crainte des actifs ainsi détenus aux bilans des banques, voire des assureurs, cela a induit du même coup une crise de liquidité, notamment interbancaire, d’une violence que l’on pensait à jamais reléguée au passé. La difficulté de résoudre les problèmes ainsi sou-levés s’en est trouvée accrue pour les pouvoirs publics. La première leçon à tirer porte donc sur la dynamique réalisée sans régulation de la titrisation et sur le rôle que ce mécanisme doit jouer à l’avenir dans l’activité des banques.

Imposture

Élément important, les agences de notations, fortes de modèles mathématiques fon-dés sur des hypothèses restrictives mal appréciées et sur l’analyse exclusive des séries passées, ont donné un label de qualité (note AAA) à des tranches des supports en question. Or, ce label s’est révélé de très piètre qualité au fur et à mesure du dérou-lement de la crise. Ces notes, qui ne visaient d’ailleurs pas le risque de liquidité, ont conduit nombre d’investisseurs, y compris bancaires, à se rassurer à bon compte et finalement à tort sur la qualité de leurs actifs financiers, sans beaucoup s’interroger sur les raisons pour lesquelles un placement coté AAA pouvait être si bien rémunéré. Il y a là une réforme incontournable à prévoir pour redonner à ces agences à la fois un sens objectif à leur mission et une indispensable crédibilité.

L’entremêlement des trois formes canoniques de la crise financière et des éléments spécifiques de la crise actuelle explique la gravité extrême de la situation, avec son cortège de banques en détresse, de panique des investisseurs, de credit crunch en cours et, finalement, de crise économique sévère. Seules les fortes actions des pouvoirs publics, au moment même où chacun doute de tous les autres, ont pu récemment commencer à détendre quelque peu le marché interbancaire et à éviter une explosion du système financier dans son ensemble. Reste maintenant à prendre du champ pour contrer les conséquences économiques de la crise financière et bancaire et pour éviter que l’on ne se retrouve dans une situation aussi critique à relativement court terme.

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Banque Finance

Pour le retour des pools bancaires

La crise financière et bancaire, qui n’a pas encore connu son épilogue, a, sinon déclenché, à tout le moins accéléré la très sérieuse crise économique mondiale en cours.

Par un phénomène d’accélérateur financier, bien mis à jour par Ben Bernanke, l’actuel Président de la Fed, lorsqu’il était professeur d’économie, la crise financière peut conduire à aggraver la crise économique par le biais notamment d’une restriction de la demande comme de l’offre de crédit. Cette contraction est alors due à la baisse de la richesse des emprunteurs (dévalorisation des actifs des entreprises et des patrimoines immobiliers et en actions des ménages) et de la valeur des gages (collatéraux) que les banques peuvent prendre à l’octroi du crédit.

La crainte de la hausse du défaut des emprunteurs induite par la crise économique peut conduire également les banques à freiner leur production de crédits, anticipant avec raison qu’un ralentissement de la croissance rend plus vulnérables les emprunteurs les plus endettés, ménages comme entreprises.

Bien entendu, l’affaissement de la demande et de l’offre de crédit s’avère alors souvent d’autant plus brutal que la période précédente a été euphorique et a amené les banques et les emprunteurs à laisser s’accumuler des situations financières tendues et se développer des conditions ne rémunérant pas correctement le risque de défaut futur. Et ce retournement du crédit conduit à approfondir la crise économique puisque, volontairement pour réduire leur endettement ou involontairement parce qu’ils obtiennent moins de crédit qu’ils ne le désirent, les ménages consomment moins et les entreprises réduisent leurs investissements comme leur Besoin en Fonds de Roulement. Puis, ce phénomène s’auto-entretient, puisque, à son tour, cette moindre demande réduit plus fortement encore la croissance et contraint d’autres agents économiques, en augmentant par conséquent leurs difficultés à rembourser leurs crédits.

Ajoutons encore que la crise bancaire due aux dévalorisations massives d’actifs au bilan des banques, impactant leurs capitaux propres et engendrant une crise de liquidité par manque de confiance entre les banques elles-mêmes, réduit encore les possibilités des établissements financiers de soutenir leur rythme antérieur de distribution de crédits.

Dans de nombreux pays, les pouvoirs publics réagissent afin de tenter de contrecarrer cet enchaînement fatal. Ils facilitent, par l’octroi de leur garantie, le refinancement interbancaire, et injectent des capitaux propres dans les banques qui en connaissent le besoin, afin qu’elles ne soient pas trop fortement contraintes par les ratios prudentiels dans leur offre de crédit. En France, en outre, les pouvoirs publics ont renforcé les systèmes de garantie des crédits octroyés aux entreprises par les banques ou les possibilités de cofinancement, par le biais d’OSEO, pour permettre d’éviter de voir se réduire le financement des entreprises.

Cette intervention publique nous semble parfaitement appropriée et nécessaire. Mais elle ne répond pas à un autre phénomène qui amène les banques à se méfier les unes des autres, non plus ici dans leur refinancement croisé, mais dans le maintien de leurs encours de crédit auprès des entreprises multi-bancarisées.

Les banques font face à une incertitude – qui peut être destructrice – liée à leur situation de non coordination explicite, alors qu’elles sont mutuellement concurrentes et complémentaires. Elles sont en effet concurrentes, car elles luttent pour prendre des parts de marché dans le crédit des entreprises saines ou pour réduire leurs concours à temps dans les entreprises dont la situation est fortement compromise ; mais également complémentaires, car en cas de retournement de conjoncture, si l’une des banques importantes d’une entreprise, fut-elle saine, décide de se retirer en coupant ses lignes de crédit, les autres peuvent subir des pertes sur les crédits antérieurement accordés, car l’entreprise peut alors périr par manque de financement. Aussi, chaque banque ne peut-elle juger des lignes à accorder ou à maintenir par sa seule analyse des perspectives de solvabilité de sa cliente. Elle doit intégrer dans sa décision son anticipation de ce que vont faire les autres banques.
Sans coordination organisée, l’équilibre se fait naturellement par des niveaux conventionnels, donc acceptées de facto par toutes les banques, de ratios « normaux » d’endettement et de rentabilité.

Par temps troubles, comme ceux liés à un fort retournement de conjoncture, aujourd’hui aggravés encore par la puissante crise bancaire et financière, ces conventions ne sont plus stables et la prévision quant aux comportements des autres banques devient plus incertaine. Il peut alors être rationnel pour une banque, à titre individuel, craignant que les autres commencent à rationner le crédit pour une entreprise donnée, d’être la première à le faire. La somme de ces rationalités individuelles conduisant rapidement à un désastre collectif.

Or, si, en cas de problème bancaire avéré, une entreprise peut se placer sous la protection d’une procédure collective (procédure dite de sauvegarde), cette procédure n’en reste pas moins publique et peut laisser des traces, en termes de réputation. Les pouvoirs publics français ont très récemment mis au point également une possibilité de médiation auprès des banques par un médiateur désigné par le Gouvernement. C’est utile, mais ponctuel. Pourquoi, en outre, ne pas revenir autant que nécessaire, et au moins temporairement, à un mode d’organisation explicite de la coordination interbancaire – qui a été balayé par la dérégulation financière les années 80 -, le pool bancaire ? Si les pools bancaires, à l’époque, étaient, pour les banques jugés peu incitatifs à se faire concurrence et apporter les meilleures conditions de crédit aux entreprises, ils avaient l’avantage certain de réduire fortement les effets pervers de l’asymétrie d’information et de la défiance contagieuse présentés ci-dessus.

Il nous semblerait utile, voire salutaire, qu’aux côtés des indispensables interventions publiques, des solutions privées, telles que celles présentées ici, soient recherchées, pour contribuer au mieux à éviter un fort rationnement du crédit, conduisant inéluctablement sinon à une crise économique plus violente encore.
 

Pour le retour des pools bancaires – Les Echos 2009 02 04

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Banque Conjoncture Politique Economique

Sortir du cercle vicieux bancaire

La crise financière et économique conduit nombre de banques dans le monde à connaître des pertes. Or elles ne peuvent lever de nouveaux fonds propres sur le marché financier car les investisseurs craignent que la santé des banques ne se détériore encore. Afin de respecter leur ratio de solvabilité (Bâle 2), elles sont donc contraintes de réduire leurs engagements, pour les faire revenir au multiple maximum réglementaire (12.5 fois) de leurs capitaux propres. Les Etats interviennent alors en entrant directement au capital des banques, suppléant ainsi le marché, et contrecarrent ainsi au mieux un crédit crunch qui serait sinon inéluctable.

Si cet enchaînement est bien connu, Bâle 2 en provoque un autre moins bien perçu, pourtant dangereux. Même lorsque les banques ne sont pas en pertes, par gros temps elles sont conduites à réduire leurs crédits et leurs positions sur les marchés. La crise financière et économique induit en effet une augmentation de la valeur calculée des engagements au bilan des banques. Il s’agit pas en l’occurrence des engagements nominaux, mais des engagements pondérés par le risque qu’ils représentent (Risk Weighted Assets : RWA).

Ce risque est mesuré par la volatilité, pour les positions sur les marchés financiers, et par la probabilité de défaut, pour les crédits. Dans les 2 cas, le calcul du risque est fondé sur les événements du passé récent. La constatation de la baisse du prix des actifs financiers et de l’augmentation de leur volatilité accroît, en effet, la valeur des engagements pondérés par leur risque et entraîne du même coup une augmentation du niveau exigible de fonds propres. De même, la dégradation de la notation des emprunteurs due à la crise économique accroît-elle mécaniquement la valeur des crédits des banques pondérés par leur risque, donc à nouveau leur besoin de fonds propres.

Or, si parce que le marché des actions ne le permet pas comme aujourd’hui, les banques ne peuvent procéder à des augmentations de capital pour rétablir leur ratio, elles ne peuvent que réduire leurs positions sur les marchés, en vendant une partie des actifs financiers qu’elles détiennent. Ce faisant, elles aggravent la baisse des marchés et leur volatilité, provoquant ainsi une nouvelle augmentation de leur valeur en risque. De même du côté des crédits, elles ne peuvent que réduire leurs prêts, renforçant alors la gravité de la crise économique et, de fait, aggravent ainsi la fragilité des acteurs économiques, donc la valeur en risque des encours de crédits existants. C’est là que le cercle vicieux se boucle parfaitement !

Bien entendu, face à ce risque de dégradation sans fin du prix des actifs et de l’économie, les Etats ont heureusement réagi très rapidement en investissant directement au capital des banques ou en garantissant certains de leurs actifs risqués, voire en rachetant directement ces actifs.

Cela est absolument nécessaire et salutaire, mais l’action qui contribuerait à rompre ce cercle vicieux au moment même où il se forme serait de réviser d’urgence les modes de calcul des engagements en risque des banques, en faisant cesser leur inquiétante pro-cyclicité, puisqu’ils sont largement fondés sur les risques récemment constatés. Ou bien, en conservant les mêmes méthodes, de moduler de façon anticyclique le niveau de capitaux propres exigés en face des engagements ainsi calculés. Alors qu’aujourd’hui, lorsque l’économie et les marchés vont bien, avec des capitaux propres inchangés, les banques peuvent prendre de plus en plus de risque, renforçant ainsi la possibilité d’un emballement. Et inversement en cas de retournement de la conjoncture et des marchés. Il serait évidemment préférable, eu égard aux mécanismes vus ci-dessus, d’exiger progressivement plus de capitaux propres lorsque tout s’améliore et a minima un maintien au même niveau lorsque tout se dégrade comme aujourd’hui.

Cette réforme nécessaire, même si elle n’est pas suffisante, nécessite un accord international (Bâle 2 en est un), alors que les Etats interviennent nationalement. C’est pourquoi aujourd’hui, la profondeur de la crise commande aux Etats d’agir sans attendre. Cependant, avec un parallélisme certain, les normes IFRS, elles-mêmes fortement pro-cycliques, ont bien été assouplies dès la fin de 2008. Or l’urgence d’une révision des normes d’exigence de capitaux propres bancaires s’impose également.

La nationalisation progressive des banques ou l’investissement à leur capital de fonds empruntés par les Etats eux-mêmes sont évidemment indispensables, mais ne peuvent être une solution de long terme. Il faut y associer a minima une réforme structurelle du calcul des Fonds Propres bancaires exigés par Bâle 2.

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Banque

La banque de détail en France : moins de croissance, plus de concurrence !

Les résultats des banques françaises sont excellents depuis plusieurs années. Et le cru 2006 n’a pas été en reste.
Le ROE (Return On Equity, c’est-à-dire le taux de rendement des capitaux propres) de l’activité banque de détail en France de nombreuses grandes banques a dépassé ces dernières années les 20%. Leurs implantations, toujours plus nombreuses sur des marchés étrangers (Asie, Europe de l’Est, Russie, Maghreb…) en pleine croissance ont apporté, en outre, une croissance vive de leurs résultats nets.

Si l’on regarde de plus près cependant, la croissance du PNB (Produit Net Bancaire, équivalent à la valeur ajoutée) issu du marché français dans la banque de détail tend fortement à se réduire. 1,6% pour le Crédit Agricole en 2006 par exemple, et la croissance sur ce marché de nombreuses banques, au premier trimestre 2007, a été proche de zéro. En fait, l’essoufflement de cette croissance, comme l’écart très élevé entre le ROE et les taux longs sans risque, conduisent à s’interroger sur la pérennité du haut niveau de la rentabilité de la banque de détail en France.

D’une part, en effet, le taux de l’OAT s’élevant approximativement à 4-4,5%, la prime de risque sur le marché de la banque de détail ressort mécaniquement à plus de 16%, ce qui ne correspond pas à la réalité, sur moyenne période, du risque de ce métier, mesuré par exemple par la volatilité de ses résultats nets ; ce qui ne traduit en rien le fait que les banques ne prendraient pas suffisamment de risques de crédit. Cette très forte rentabilité conduit ainsi depuis plusieurs années les acteurs en présence à réinvestir sur le marché français, par création de nouvelles agences, par exemple. Cela se produira tant que le ROE ne sera pas revenu à une norme plus économiquement justifiable. C’est d’ailleurs cet investissement même, par accroissement de l’offre face à une demande stable, qui conduit à pousser les marges et les prix vers le bas, et qui induira un affaiblissement progressif de la rentabilité.

D’autre part, il est important de faire l’analyse de ce que nous pouvons attendre des trois principaux facteurs structurels de croissance du marché de la banque de détail et de comprendre ainsi que ce marché sera durablement stagnant en France :

  1. la croissance démographique : elle est très faible en Europe et deviendra négative prochainement, même si en France elle continuera sa très légère progression. Or, l’évolution du nombre d’habitants est évidemment déterminant pour l’évolution du marché de la banque de détail.
  2. la croissance du PIB : la croissance potentielle du PIB en Europe plafonne durablement autour de 2%. La croissance mondiale qui oscille entre 5 et 6% est fortement tirée par des pays émergents comme la Chine, l’Inde ou la Russie. Lorsqu’un pays s’enrichit, les habitants épargnent et empruntent davantage en perspective de revenus plus élevés à l’avenir, activités qui nourrissent le chiffre d’affaires des banques. La contribution de la croissance économique sur le PNB de la banque de détail en France restera donc limitée, selon toute vraisemblance de l’ordre maximum de 3-4% l’an en valeur (inflation comprise).
  3. la modernisation et l’équipement du marché : le marché français est déjà totalement bancarisé et très bien équipé en produits bancaires ; il y a probablement peu à attendre à court- moyen terme d’une innovation qui viendrait ouvrir de larges perspectives de croissance de ce marché.

Si la pression concurrentielle restait au niveau de celle des dernières années, les impacts conjugués de ces trois facteurs conduiraient à une croissance du marché d’environ 4%, donc vers un potentiel de croissance du PNB de même ordre.

La croissance structurelle du marché n’explique donc qu’une partie de l’augmentation de la forte rentabilité des banques des dernières années. Cette dernière a eu deux autres sources, quant à elles, transitoires :

  • Le développement de la tarification a été un moteur important de l’amélioration de la rentabilité. Mais, nous atteignons maintenant les niveaux européens moyens et le consumérisme joue un rôle de plus en plus important. La conjugaison de ces deux facteurs, sans même parler de l’intensification de la concurrence, tend à limiter la croissance future de la facturation, sauf à trouver de nouveaux services avec de nouvelles valeurs ajoutées. Ajoutons que les nouvelles réglementations contribuent au tassement de la croissance de la tarification.
  • Le renforcement de la relation bancaire en a également constitué un moteur puissant. Toutes les banques ont investi dans la mise en œuvre de programmes relationnels et de gestion événementielle. Ces outils ont permis d’agir commercialement à « coup plus sûr », en travaillant mieux les bases de données et en permettant de proposer aux différents segments de clients des produits à meilleur escient, donc avec un taux de réalisation de vente beaucoup plus élevé. Ils ont permis de gagner de la productivité commerciale. Aujourd’hui, si des champs de progression subsistent dans chaque banque, l’essentiel a été réalisé.

Si les sources transitoires de croissance de la rentabilité se tarissent et si la croissance structurelle du marché reste à un niveau très modeste, alors la recherche de croissance du PNB de chaque banque ne pourra se faire qu’à partir de la conquête de parts de marché entre les différents acteurs, conquête d’ailleurs fortement désirée dans le contexte actuel de très forte rentabilité. Mais, chaque banque conduisant un raisonnement analogue, et chacune étant désireuse de continuer d’investir, dans un marché sans dynamique de croissance, les plans des différentes banques sont mutuellement incompatibles.

La résultante en est obligatoirement une forte augmentation de la pression concurrentielle -au plus grand bénéfice des clients- qui elle même pèse sur les marges et affaiblit le ROE. Ce phénomène vient à son tour accélérer le processus, conduisant à renforcer la nécessité pour chaque banque de prendre des parts de marchés, afin de tenter de compenser la baisse des marges par une augmentation du volume. Cette pression concurrentielle très accrue et cette course à la part de marché permettent aujourd’hui aux clients des banques de financer leur logement à un taux moins élevé que celui de l’emprunt d’Etat, de voir les droits d’entrée de l’assurance vie s’abaisser significativement ou encore de pouvoir obtenir ponctuellement une sur-rémunération de son épargne sur un compte à terme ou un livret boosté. La guerre des prix semble bien lancée.

Le PNB de la banque de détail, toutes banques confondues, n’augmentera probablement dès lors plus que de 0 à 2% l’an. Si l’on y ajoute la pression très forte sur la croissance du PNB engendrée par l’aplatissement de la courbe des taux, qui pourrait durer encore, le pronostic sur la croissance ne peut guère raisonnablement être très optimiste. A ce jeu, certaines banques gagneront, d’autres perdront. La concentration du monde bancaire en France, comme évidemment en Europe, n’est certainement pas achevée. La gestion plus rigoureuse encore des charges non plus. Ni la recherche d’un développement sur les marchés étrangers à fort potentiel.

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